GAZA

Gaza: les conséquences de l’effondrement du système de santé sur la population

Sans cessez-le-feu et sans entrée totale de l’aide humanitaire, le système de santé à Gaza s’effondrera. Qu’est-ce que cela signifie en pratique ?

Gaza, octobre 2023. © Mohammed Zaanoun

Gaza, octobre 2023. © Mohammed Zaanoun

Médecins du Monde appelle à un cessez-le-feu, car l’arrêt des hostilités qui ciblent les civils et les infrastructures civiles, en particulier les structures de santé, est une priorité absolue compte tenu de la grave catastrophe humanitaire et de santé publique dans la bande de Gaza.

Toutes les parties, y compris Israël, doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir immédiatement un accès humanitaire total, sans entrave et sans restriction aux civils de la bande de Gaza. Outre la nourriture, l’eau et les fournitures médicales, le carburant doit entrer en quantité suffisante pour répondre aux besoins humanitaires et sanitaires désastreux de la population, notamment pour assurer les besoins énergétiques des hôpitaux actuellement au bord de l’effondrement.

Structures de santé débordées

L’intensité sans précédent des frappes aériennes israéliennes sur Gaza – l’armée de l’air israélienne a annoncé avoir largué 6’000 bombes en une semaine, ce qui correspond presque à ce que les États-Unis lançaient sur l’Afghanistan en un an – entraîne un bilan extrêmement lourd de morts parmi les civils et un nombre élevé de blessés. En conséquence, les hôpitaux sont débordés, avec un afflux constant de patients blessés dépassant largement leurs capacités maximales. Les observateurs rapportent que les opérations chirurgicales doivent être pratiquées sur le sol des hôpitaux, sans anesthésie et à la lumière des téléphones portables. Les prestataires de soins travaillent dans des conditions extrêmes.

Attaques contre les infrastructures et le personnel de santé

19 hôpitaux ont été endommagés, parmi lesquels 12 ont été contraints de fermer leurs portes en raison des dommages subis, du manque d’électricité et de fournitures et/ou des ordres d’évacuation. Parmi ces violations graves, l’attaque de l’hôpital Al Ahli le 17 octobre 2023, qui a tué des centaines de personnes parmi les plus vulnérables, constitue une violation particulièrement grave du droit international humanitaire, pour laquelle les coupables devront rendre des comptes. 57 membres du personnel médical ont été tués depuis le début de l’escalade, dont des médecins, du personnel paramédical et des infirmières.

Grave pénurie d’électricité et de fournitures médicales

Les structures de santé dans la bande de Gaza s’effondrent en raison du siège total de l’eau, de la nourriture, de l’électricité et du carburant imposé à Gaza, dans le cadre duquel Israël a exacerbé les effets de son blocus déjà existant depuis 17 ans. Les hôpitaux s’appuient sur des générateurs de secours, qui sont loin d’être suffisants pour couvrir leurs besoins en électricité et affectent donc gravement leurs fonctions les plus critiques. Alors qu’avant la crise, le droit à la santé des Gazaouis était déjà compromis par la pénurie de médicaments due au blocus, les réserves de médicaments, d’équipement médical et de sang sont presque entièrement épuisées.

Obstacles à l’accès des ambulances aux malades ou aux blessés

Bien que la capacité des ambulances soit déjà insuffisante, la pénurie de carburant a un impact sur leur fonctionnement. L’accès aux malades et aux blessés est également extrêmement difficile, compte tenu des graves dégâts sur les routes dus aux bombardements violents.

Ordres d’évacuation du gouvernement israélien aux hôpitaux et civils du nord de Gaza

22 hôpitaux situés dans le nord de Gaza ont reçu à plusieurs reprises l’ordre du gouvernement israélien d’évacuer, dans le cadre de l’ordre d’évacuation général qui appelait initialement 1,1 million de personnes au nord à se déplacer vers le sud de Gaza le vendredi 13 octobre. Malgré les ordres de déplacement, 17 hôpitaux restent opérationnels dans le nord de Gaza, car l’évacuation mettrait en danger la vie de nombreux patients fragiles : les personnes sous hémodialyse, les nouveau-nés en couveuse ou les patients en soins intensifs ne peuvent pas être privés de soins médicaux vitaux. L’aide humanitaire limitée arrivée jusqu’à présent dans la bande de Gaza n’a pas atteint les hôpitaux du nord. De plus, les 1,4 million de personnes qui se sont déplacées du nord vers le sud suite à l’ordre d’évacuation n’ont trouvé aucun endroit sûr, le sud de la bande de Gaza étant toujours fortement visé par les bombardements.

Manque d’eau potable et de nourriture

La quantité moyenne d’eau par personne et par jour est désormais de 3 litres à Gaza (le seuil d’urgence humanitaire est de 15 litres par jour). Déshydratations, épidémies et à pertes de vie supplémentaires menacent la population, en particulier les enfants et les personnes les plus vulnérables. Les hostilités et le blocus total ont complètement perturbé la chaîne de valeur agroalimentaire et le secteur de la réfrigération : les stocks alimentaires s’épuisent et de nombreux produits alimentaires de base ne peuvent pas être cuits en raison du manque de carburant. Le personnel de MdM à Gaza souffre déjà de problèmes d’estomac dus à l’ingestion d’eau contaminée et d’aliments hors chaîne du froid.

Maladies infectieuses

Alors que la majeure partie de la population a recours à des sources d’eau non potable pour boire, Gaza pourrait être confrontée à une recrudescence potentielle de maladies hautement infectieuses comme le choléra. Les besoins sont élevés en termes de services de santé mentale et de soutien psychosocial à court et à long terme pour un grand nombre de personnes psychologiquement traumatisées. Nour, psychologue de MdM France actuellement à Gaza, affirme que « même si nous survivons à cela, nous ne nous rétablirons jamais mentalement ».